Le secteur bancaire kényan traverse une période de transformation significative, marquée par une réduction des taux d’intérêt qui pourrait avoir des répercussions profondes sur l’économie du pays. En février 2025, plusieurs banques ont annoncé une baisse de leurs taux d’intérêt, une décision qui vise à stimuler l’emprunt et à soutenir la croissance économique dans un contexte de défis financiers persistants.
Contexte économique du Kenya
Le Kenya, comme de nombreux pays africains, a été confronté à des défis économiques au cours des dernières années. La pandémie de COVID-19 a eu un impact sur de nombreux secteurs, entraînant une contraction de l’économie de 0,3 % en 2020. Bien que le pays ait connu une reprise, la croissance est restée fragile, avec des taux de croissance du PIB estimés à 5,2 % en 2023, selon la Banque mondiale.
Les taux d’intérêt élevés ont été un obstacle majeur à l’emprunt pour les entreprises et les particuliers. En 2024, le taux d’intérêt moyen des prêts bancaires au Kenya était d’environ 13,5 %, ce qui a limité l’accès au crédit et freiné les investissements. Face à cette situation, les banques ont commencé à réévaluer leur politique de taux d’intérêt.
La réduction des taux d’intérêt
En février 2025, plusieurs grandes banques kényanes, dont Equity Bank et CBK Bank, ont annoncé une réduction de leurs taux d’intérêt de 1 à 2 points. Equity Bank a réduit son taux d’intérêt sur les prêts personnels de 13 % à 11 %, tandis que KCB a abaissé son taux sur les prêts aux petites et moyennes entreprises (PME) de 12 % à 10 %.
Cette décision a été accueillie avec enthousiasme par les économistes et les entrepreneurs. Selon une étude menée par la Kenya Bankers Association, environ 60 % des entreprises interrogées ont déclaré qu’une réduction des taux d’intérêt les inciterait à emprunter davantage pour financer leurs opérations et leurs projets d’expansion.
Des pénalités pour les banques qui ne s’alignent pas
Les banques kényanes abaissent rapidement leurs taux de prêt suite à un mandat de la Banque centrale du Kenya (CBK), qui a averti les institutions financières de pénalités quotidiennes en cas de non-respect.
Le régulateur prend des mesures strictes contre les banques qui tardent à baisser leurs taux malgré les multiples réductions des taux de la Banque centrale visant à rendre le crédit plus abordable pour les entreprises. En vertu de la loi bancaire du Kenya, la CBK a le pouvoir d’imposer des amendes de 20 millions KES (154 619 USD) ou trois fois le bénéfice financier obtenu par les prêteurs non conformes.
Les banques risquent des pénalités supplémentaires de 100 000 KES (773 USD) par jour pour chaque infraction. Tandis que les dirigeants de banque pourraient être confrontés à des amendes allant jusqu’à 1 million KES (7 730 USD). Les grandes institutions financières telles que KCB Group, Equity Group, Cooperative Bank, I&M et DTB ont réagi en abaissant les taux d’intérêt d’un à quatre points de pourcentage. L’objectif de la CBK est de stimuler l’activité économique et d’apporter un soulagement aux ménages et aux entreprises confrontés à des difficultés financières.
Impact sur l’économie
La réduction des taux d’intérêt pourrait avoir plusieurs effets positifs sur l’économie kényane. Tout d’abord, elle devrait encourager l’emprunt, ce qui pourrait stimuler la consommation et l’investissement. Les PME, qui représentent environ 80 % des emplois au Kenya, pourraient bénéficier particulièrement de cette mesure, leur permettant d’accéder à des financements à des conditions plus favorables.
De plus, une augmentation de l’emprunt pourrait également soutenir la création d’emplois. Selon les estimations, chaque million de shillings kenyans (environ 6 800 USD) investi dans une PME pourrait générer jusqu’à 10 emplois directs. Si les banques parviennent à stimuler l’emprunt, cela pourrait contribuer à réduire le taux de chômage, qui s’élevait à environ 7,4 % en 2024.
Réactions des acteurs économiques
Les réactions à cette décision sont largement positives. Les entrepreneurs, en particulier ceux des secteurs les plus touchés par la pandémie, se sont montrés optimistes quant à l’avenir. Avec des taux d’intérêt plus bas, ces derniers peuvent investir dans de nouveaux équipements et embaucher plus de personnel.
Cependant, certains analystes mettent en garde contre les risques potentiels associés à cette réduction des taux. Ils soulignent que si les banques ne parviennent pas à gérer les risques de crédit, cela pourrait entraîner une augmentation des défauts de paiement. En 2024, le taux de créances douteuses dans le secteur bancaire kényan était d’environ 14 %. Un chiffre qui pourrait augmenter si les emprunteurs ne sont pas en mesure de rembourser leurs prêts.
Stabiliser l’économie kényane à court terme
À long terme, la réduction des taux d’intérêt pourrait contribuer à stabiliser l’économie kényane et favoriser une croissance durable. Cependant, il est essentiel que les banques adoptent des pratiques de prêt prudentes pour éviter une crise de crédit. Les régulateurs financiers devront également surveiller de près l’évolution du marché pour s’assurer que les banques maintiennent des normes de prêt responsables.
En outre, le gouvernement kenyan pourrait jouer un rôle clé en soutenant les initiatives visant à renforcer la résilience économique. Des programmes de formation pour les entrepreneurs, des incitations fiscales pour les investissements dans les PME et des efforts pour améliorer l’accès au marché pourraient tous contribuer à maximiser les avantages de la réduction des taux d’intérêt.