La crise énergétique au Mali est devenue un sujet de préoccupation majeur, non seulement pour le pays, mais aussi pour l’ensemble de la région de l’Afrique de l’Ouest. En mars 2025, alors que le Mali fait face à des défis énergétiques croissants, la situation soulève des questions sur le rôle de l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal (OMVS) et son efficacité dans la gestion des ressources hydriques et énergétiques.
Contexte de la crise énergétique malienne
Le Mali, un pays enclavé d’Afrique de l’Ouest, dépend largement de l’hydroélectricité pour répondre à ses besoins énergétiques. Environ 60 % de l’électricité du pays provient de sources hydroélectriques, principalement des barrages construits sur le fleuve Sénégal. Cependant, la combinaison de la variabilité climatique, de la mauvaise gestion des ressources et de l’augmentation de la demande énergétique conduit à une crise énergétique sans précédent.
En 2024, le pays enregistre une augmentation de la demande d’électricité de 8 % par rapport à l’année précédente, atteignant un total de 1 200 MW. Cependant, la capacité de production n’a pas suivi cette tendance, avec une production stagnante autour de 800 MW. Ce déséquilibre entraîne des coupures de courant fréquentes, affectant les ménages, les entreprises et les services publics.
L’état actuel des infrastructures hydrauliques du Mali
Mis en service en 2021, le barrage de Manantali devait initialement produire 540 GWh par an, avant que sa capacité installée de 200 MW ne lui permette d’atteindre jusqu’à 740 GWh. Pourtant, aujourd’hui, sa production est fortement limitée. En cause, des problèmes d’entretien, une gestion financière chaotique, et des arriérés de paiement accumulés auprès de l’exploitant sud-africain Eskom, responsable de Manantali.
Les barrages de Félou (60 MW) et Gouina (140 MW) devaient compléter cette production. Gouina, en particulier, a été présenté comme une alternative importante pour stabiliser le réseau énergétique malien. Toutefois, en octobre 2022, un incident technique à la centrale de Gouina entraîne une interruption massive de l’approvisionnement électrique au Mali, au Sénégal et en Mauritanie. Depuis, la production de ces infrastructures reste intermittente, et leur contribution à l’approvisionnement malien demeure minime.
Par ailleurs, la situation énergétique du Mali dépend de plusieurs facteurs interdépendants. Tout d’abord, le pays s’appuie fortement sur les hydrocarbures importés pour compléter son mix énergétique. En raison de l’absence de production locale de pétrole ou de gaz, le Mali importe l’intégralité de ses besoins en hydrocarbures. Une dépendance qui rend le pays vulnérable aux fluctuations des prix du marché et aux taxes de transit imposées dans la région.
OMVS : Un acteur clé
L’OMVS, créée en 1972, regroupe le Mali, le Sénégal, la Mauritanie et la Guinée. Son objectif principal est de promouvoir le développement intégré des ressources en eau du fleuve Sénégal. L’organisation joue un rôle crucial dans la construction de plusieurs barrages, dont le barrage de Manantali, qui a une capacité de 200 MW. Cependant, malgré ces infrastructures, l’OMVS fait face à des critiques concernant sa capacité à gérer efficacement les ressources hydriques et à répondre aux besoins énergétiques croissants des pays membres.
Les paradoxes de l’OMVS
Bien que l’OMVS ait été créée pour gérer les ressources en eau et promouvoir l’hydroélectricité, les pays membres, y compris le Mali, continuent de souffrir de pénuries d’électricité. En 2024, le Mali a importé environ 30 % de son électricité, principalement du Sénégal, mais ces importations ne suffisent pas à couvrir la demande croissante.
De plus, la gestion des barrages par l’OMVS est critiquée pour son manque de transparence et d’efficacité. Les pays membres ont souvent des intérêts divergents, ce qui complique la prise de décisions collectives. Par exemple, le Sénégal a priorisé l’irrigation pour l’agriculture, tandis que le Mali a besoin d’eau pour la production d’électricité. Ce manque de coordination a accentué la crise énergétique au Mali.
Les conséquences de la crise
La crise énergétique a des répercussions profondes sur l’économie malienne. Selon les estimations, les coupures de courant coûtent au pays environ 2 % de son PIB chaque année. Les entreprises, en particulier dans les secteurs de l’industrie et des services, souffrent de pertes de productivité, ce qui entrave la croissance économique. De plus, les ménages sont contraints de recourir à des sources d’énergie alternatives, souvent coûteuses et polluantes, comme les générateurs diesel.
Sur le plan social, la crise énergétique a également des conséquences sur l’éducation et la santé. Les écoles et les hôpitaux, qui dépendent de l’électricité pour fonctionner, sont souvent affectés par les coupures, ce qui compromet l’accès à l’éducation et aux soins de santé.
Vers une solution durable
Pour sortir de cette crise, plusieurs solutions doivent être envisagées. Tout d’abord, il est essentiel d’améliorer la gestion des ressources en eau au sein de l’OMVS. Cela nécessite une meilleure coordination entre les pays membres et une transparence accrue dans la prise de décisions. Des mécanismes de partage des ressources doivent être mis en place pour garantir que chaque pays puisse répondre à ses besoins énergétiques.
Ensuite, le Mali doit diversifier ses sources d’énergie. Bien que l’hydroélectricité soit une ressource clé, le pays dispose également d’un potentiel important en matière d’énergie solaire. Avec un ensoleillement moyen de 2 500 heures par an, le Mali pourrait développer des projets solaires pour compléter sa production d’électricité. Des investissements dans les énergies renouvelables pourraient non seulement réduire la dépendance à l’hydroélectricité, mais aussi créer des emplois et stimuler l’économie locale.
Enfin, il est crucial d’impliquer les communautés locales dans la gestion des ressources énergétiques. En favorisant la participation des citoyens et des acteurs locaux, le Mali peut s’assurer que les solutions mises en place répondent réellement aux besoins des populations.
Conclusion
La crise énergétique au Mali est un défi complexe qui nécessite une approche multidimensionnelle. Bien que l’OMVS ait été créée pour gérer les ressources en eau et promouvoir l’hydroélectricité, son efficacité est remise en question face aux besoins croissants des pays membres.
Pour surmonter cette crise, le Mali doit améliorer la gestion de ses ressources, diversifier ses sources d’énergie et impliquer les communautés locales. En agissant de manière proactive, le pays peut espérer un avenir énergétique plus durable et résilient.