Le développement et la protection de l’environnement sont intrinsèquement liés. Or, l’Afrique, dont l’économie dépend largement des industries extractives, est souvent contrainte de choisir entre ces deux impératifs. Pourtant, la voie de la durabilité propose une multitude d’opportunités économiques pour ce continent en pleine expansion.
Iniquité climatique et vulnérabilité économique
L’Afrique n’est responsable que de 4 % des émissions mondiales de carbone. Une proportion dérisoire comparé aux impacts du dérèglement climatique qui touche le continent. Les inondations, les sécheresses, les vagues de chaleur et autres effets néfastes provoquent 100 millions de déplacements internes. En outre, l’adaptation au changement climatique coûte annuellement au continent près de 5 à 7 milliards USD et devrait atteindre 50 milliards USD d’ici 2030.
La perturbation climatique alarmante aggrave également les vulnérabilités sévères du continent. La famine qui sévit dans de nombreuses régions de l’Afrique demeure une problématique majeure. Malgré les efforts déployés pour atteindre les objectifs de développement durable (ODD), les numéros 1 et 2, aucune pauvreté et zéro faim sont les plus dur à réaliser.
Économie dépendante des activités extractives
La quête mondiale incessante de durabilité remet en question les activités extractives, qui sont pourtant essentielles à l’économie de nombreuses nations africaines. Actuellement, 45 pays africains sont tributaires des exportations de matières premières, y compris les combustibles fossiles. Ces pays sont en effet des exportateurs majeurs de matières premières et des fournisseurs clés dans de nombreux secteurs. Par exemple, le Togo est le principal fournisseur de soja bio vers l’Union européenne, tandis que Madagascar est le premier exportateur mondial de vanille.
Ces secteurs représentent une source importante de revenus, particulièrement en devises. De nombreux débats suggèrent que ces nations devraient exporter leurs ressources naturelles pour stimuler la croissance économique tout en préservant leur environnement. D’un autre côté, l’exploitation et l’industrialisation de ces secteurs offrent une alternative de développement durable, mais engendrent des impacts négatifs sur l’environnement.
La meilleure option consiste à concilier le développement durable et la croissance économique. Toutefois, cela reste un défi, notamment pour l’industrialisation du secteur minier, dont les ressources dépendent fortement des extractions d’énergies fossiles. Ces pays subissent des pressions croissantes pour renoncer à cette source de revenus potentiellement lucrative. Paradoxalement, les investissements dans ce secteur sont en constante augmentation. Les multinationales poursuivent leurs explorations dans le bassin d’Orange. Par exemple, en mars 2024, Total Énergie obtient un nouveau permis d’exploration offshore.
Afrique : Centre industriel propre en devenir
La crise du covid révèle l’importance cruciale de la numérisation. La digitalisation s’avère indispensable pour maintenir l’enseignement et la productivité des entreprises pendant le confinement. La visioconférence, même après la pandémie, constitue une véritable aubaine pour le continent. Cela permet de révolutionner l’éducation, particulièrement dans les zones reculées et d’introduire de nouvelles méthodes de travail pratique.
Les Fintechs, comme le mobile money, connaissent un essor rapide en Afrique. Ces innovations transforment la vie des personnes non bancarisées et favorisent l’inclusion financière, surtout pour les jeunes et les femmes. Les avancées technologiques et révolutionnaires permettent également de diminuer l’empreinte carbone. Au Mali, la digitalisation des services administratifs et la téléconsultation permet de réduire les longs déplacements onéreux. Il en va de même pour le programme « Sénégal numérique 2025 » soutenu par le PNUD. Cette initiative gouvernementale devrait en outre créer 140 000 emplois et faire croître la contribution du numérique à 10 % du PIB.
Par ailleurs, de nombreux projets gouvernementaux alignés sur les objectifs de développement durable se multiplient, notamment ceux visant la résilience climatique. Parmi eux, le projet de parc solaire à Nairobi, destiné à fournir un approvisionnement électrique stable, et les initiatives d’hydrogène vert, soutenues par la Banque européenne d’investissement, l’Alliance solaire internationale et l’Union africaine, se démarquent.
Révolution durable : Les défis persistants
Depuis l’adoption des Objectifs de développement durable (ODD) en 2015, des avancées notables sont réalisées dans les domaines de l’éducation, de la santé et de l’égalité des genres. Cependant, l’Afrique rencontre encore des difficultés à éradiquer la pauvreté et la faim, bien que ces enjeux demeurent prioritaires. Les États et les collectivités doivent mieux harmoniser et coordonner leurs efforts pour atteindre les ODD, en adoptant une approche globale et interdisciplinaire.
Approche en silo des ODD
Les États et les collectivités locales travaillent souvent de manière isolée dans différents domaines, sans coordination ni collaboration. Une approche globale, intégrant les aspects sociaux, environnementaux et économiques, est essentielle pour atteindre les ODD. Il est nécessaire de repenser fondamentalement la manière de traiter les problèmes pour obtenir un impact durable. Chaque cible constitue un indicateur de progrès et doit être perçue comme une opportunité d’amélioration.
Déficit de financement
L’insuffisance de fonds représente un défi majeur dans la réalisation des ODD, malgré des dispositifs comme le Fonds vert. En effet, l’Afrique ne reçoit que 3 % du financement mondial pour l’adaptation climatique. Les ODD ne sont pas prioritaires pour les principaux financeurs, qui préfèrent investir dans les ressources minières africaines. De plus, les finances publiques sont souvent mal gérées, limitant l’impact durable et optimal des ressources disponibles. Les investissements dans la participation à des conférences nationales et internationales sont coûteux, alors que la numérisation permet des interactions à moindre coût.
Inadéquation des projets avec la culture africaine
Certains projets verts et durables échouent en raison de décalages culturels. Les progrès récents découlent principalement des efforts de survie aux catastrophes naturelles, avec très peu de véritables initiatives visant à renforcer la résilience face au dérèglement climatique. Pour garantir leur durabilité et leur succès, il est impératif d’adapter ces projets aux cultures locales. L’éthique, la coopération et le leadership gouvernemental sont cruciaux pour surmonter les défis en Afrique, notamment dans des régions conflictuelles comme le Nord-Kivu. Un équilibre entre développement économique et survie de l’humanité est également nécessaire.